Les histoires de personnes au fond du gouffre, on en parle mais on s’en agace très vite ; comme dans la vie réelle où le sourire est de mise et les larmes vite séchées au coin de l’œil. La sensibilité n’est pas socio-compatible. Les larmes c’est à la maison s’il-vous-plaît. La vulnérabilité semble avoir quelque chose de honteux. Et le malheur n’est vendeur que si l’happy-end se dessine à la fin. Etre triste deux minutes ça va, être triste des semaines faut pas pousser. Les phrases type ‘Si tu ne vas pas mieux c’est parce que tu ne veux pas t’en sortir’ commence à pleuvoir. Et là non seulement tu te sens au fond du gouffre, mais tu sens le poids de la dalle de béton avec.
Se retrouver au fond du gouffre, c’est en réalité avoir effectuer un bon nombre de mauvais choix en chemin. On sait pertinemment ce qui est bon pour nous, on le sait. Mais on ne le suit que très rarement. Et pourquoi nous engageons-nous si passivement sur le chemin de l’auto-destruction me diriez-vous ? Parce qu’aller mal c’est confortable. Aller mieux, ça demande des efforts ; c’est comme enfiler ses baskets pour aller faire son jogging alors qu’il pleut vache qui pisse dehors. Aller mieux c’est aller au delà des automatismes que l’on a développés depuis tout jeune. Il est bien rare en effet que l’on soit éduqué au bonheur. Éduqué à être compatible avec le rêve de la société oui, mais apprendre à être heureux, beaucoup moins. Peu de gens peuvent se targuer d’avoir apprit à ne pas prendre les choses trop personnellement, à s’entourer de ce qui leurs font du bien, à faire les choix qui leurs semblent bons pour eux et non pour les autres, à voir le positif dans chaque expérience et à en apprécier le résultat quel qu’il soit. Pour toutes ces raisons et d’autres encore, on peut dire qu’on s’est passivement laissés porter vers la voie de l’auto-destruction, et que très peu d’entre nous vont se battre pour sortir des sentiers battus. Ensuite et surtout, deux choses bien distinctes et pourtant si complémentaires nous rendent la tâche encore plus ardue, j’ai nommé attente et pression.

Attente et Pression marchent ensemble main dans la main. Les attentes, par définition, sont les comportements que les gens attendent de vous, ou les comportements que vous attendez d’avoir envers vous-même. Cela peut être au travail, dans le cercle familial ou amical (on attend de vous un travail irréprochable, ou d’être une personne marrante, intéressante, moins sensible peut être, on veut que vous soyez plus présent, ou que vous faisiez tel choix plutôt qu’un autre…). Lorsque vous êtes seul, cela peut être ce que vous espérez faire ou être (ne plus paresser devant le canapé et faire son sport alors que vous êtes épuisé de votre journée ; vouloir paraître positif alors que vous ne vous sentiez pas dans votre assiette…). Vos journées sont pleines d’attentes. Parfois elles sont irréelles (penser que quelqu’un attend quelque chose de vous, alors qu’en fait que nenni). Parfois encore elles sont inconcevables (s’en vouloir de ne pas être plus actif alors que l’on croule déjà sous les activités ; vouloir se rendre plus disponible pour les autres alors que l’on arrive même plus à s’entendre penser). Avec les attentes, on se ment à nous-mêmes et on fait indirectement mentir les autres. On créé une image erronée de ce que les gens ‘pensent et attendent de nous’, on plonge dans une certaine parano ; également on attend de nous-même des buts impossibles ou difficiles à atteindre.

Félicitations ! Maintenant que ces deux chérubins Attente et Pression commencent à vous bouffer de l’intérieur, il est temps de passer à la vitesse supérieure et de tuer sans état d’âme vos fidèles créations. Comment ? Deux solutions s’offrent à vous : soit s’isoler volets fermés et être certain de ne plus rencontrer aucun semblable de votre espèce, soit décider d’attaquer de front. Si vous avez choisi la deuxième solution, déjà bravo, et voici deux remèdes imbattables pour vous sortir la tête de l’eau (ou le corps du gouffre, à vous de voir) :

Le deuxième remède est de ne rien prendre personnellement. Les Toltèques l’avaient bien compris. En prenant personnellement la remarque d’untel, le jugement de Germaine et l’opinion de Machin, on court droit à la catastrophe. Premièrement car dans la grande majorité des cas, on se fait de fausses idées (nous ne sommes clairement pas dans la tête du voisin, inutile de se creuser la tête à faire des suppositions et à penser à sa place, sans oublier que dans la grande majorité des cas, nos suppositions s’avèrent fausses) ; deuxièmement parce que ce que pense autrui n’a pas à nous affecter. Du moins pas au point d’installer une pression démesurée ou à grignoter notre confiance en nous.






